Welcome in America //Otabek Altin

Welcome in America !

● feat. Otabek Altin●

▪▪▪   Elle acquiesça. D’une façon ou d’une autre, elle devait aller à la patinoire, elle récupèrerait les infos là-bas. Pour l’instant, elle était bien la seule patineuse russe à être venue en Amérique pour ce centre, mais qui sait, peut-être que certaines connaissances seraient aussi de la partie.

Altin lui posa à son tour une question. Qui ne l’étonna pas d’ailleurs. Cela faisait un moment qu’elle lui tenait la jambe après tout, mais elle trouvait cela dommage qu’il n’ait que l’idée de partir. Il était bien moins tendu que tout à l’heure, ses épaules étaient basses, ses yeux plus ouverts, sa posture décontractée. Bien moins sur la défensive que lorsqu’elle l’avait abordé dans la rue. Mila se pencha en avant, croisant les mains sous son menton, l’air malicieux.

- Eh bien, eh bien, tu veux t’enfuir ?

Elle rit toute seule à cette imitation de mafieuse en pleine affaire. Finalement, la russe se redressa sur sa chaise et croisa les bras.

- Tu peux rentrer dès que tu le souhaites. Je ne vais pas te garder enfermer ici indéfiniment, cela fâcherait beaucoup de monde. De toute manière, il faut que je passe à la patinoire, alors...

En y repensant, ça aussi elle aurait pu le faire dès le départ. Tant qu’elle était devant le centre, elle se serait présenté, aurait finaliser son adhésion et ensuite serait rentrée.

Elle n’aurait alors pas rencontré Otabek. Même si le début avait été compliqué, elle ne regrettait pas de lui avoir forcé la main. C’était un garçon intéressant, le contact avec les autres était difficile pour lui. Elle était certaine que voir du monde, autre que ceux qu’il voyait sans cesse, était une bonne chose pour lui. Il affirmerait sans doute le contraire, mais Mila ne démoderait pas de cette idée maintenant qu’elle avait eu l’occasion de passer un peu de temps avec lui.

Après tout, c’était tellement plus simple de prétendre qu’on préfère être seul qu’avouer que la solitude nous bouffe de l’intérieure. Après tout, si ça avait vraiment été le cas du kazakh comme le disent les médias, il aurait craché sur Mila plutôt qu’accepter de la suivre, il aurait fait demi-tour dès qu’il en aurait eu l’occasion. Il n’aurait pas ouvert la bouche une seule fois.

- Tu sais…

Elle hésita un instant. Est-ce qu’elle devait lui dire ? Ce n’était pas franchement approprié, surtout venant d’elle. Néanmoins, elle se lança sans regret.

- Je suis vraiment contente d’avoir pu parler un peu avec toi. Je sais que je ne t’ai pas vraiment laissé le choix, mais je ne regrette pas de t’avoir embarqué. Tu es quelqu’un de bien et vraiment sympa. Merci !

Ce devait être la première fois qu’elle lui disait vraiment « merci ». Ou qu’elle se sentait obligée de dire à haute voix ce qu’elle pensait de quelqu’un. C’était peut-être étrange, mais elle avait eu envie de le lui dire. Peut-être parce qu’elle était certaine qu’il avait moins confiance en lui qu’il ne le laissait croire aux médias. En tout cas, elle était ravie d’être avec lui en ce moment, ravie et heureuse.


 

Welcome in America !

● feat. Mila Babicheva ●

▪▪▪ Sa question a l'effet de provoquer gentiment Mila, qui prend un air qui n'est pas forcément très rassurant - mais Otabek reste de marbre, fidèle à lui-même.

« Eh bien, eh bien, tu veux t’enfuir ? »

S'enfuir, ce n'est plus vraiment le cas - à considérer une fuite face à l'ennemi. Mais il ne voit plus la jeune femme comme telle, alors le terme n'est pas le bon. Et tandis qu'elle l'invite à rentrer chez lui, il réfléchit quelques secondes à la proposition - oui, il pourrait en profiter et s'esquiver de cette demeure trop riche, se rendre à cette foutue station essence, faire le plein de sa moto adorée et partir faire un tour pour se détendre un peu.

L'idée n'est pas mauvaise...

« Tu sais… »

Elle le sort de ses pensées - il la regarde à nouveau, les sourcils légèrement froncés. Et lorsqu'elle lui balance sa petite tirade, s'accompagnant d'un remerciement, il a un petit moment de black-out. Avant d'esquisser un petit sourire, touché par les paroles de la patineuse.

Il comprenait mieux son amitié avec Yuri. Il ne cache pas sa réputation de solitaire, et ne s'est, jusque là, pas forcément montré agréable - il l'a aidée, et alors ? Et pourtant, elle ne l'a pas lâché. Elle n'a pas dépassé les limites - à plusieurs reprises, il a bien compris que malgré son insistance, elle lui laissait la porte ouverte pour qu'il s'en aille et ne la revoit plus jamais.

« Je vois, » répond simplement le kazakh, agrémentant ses paroles d'un sourire un peu plus appuyé.  

Quoi dire de plus, finalement ? Il ne va pas s'étaler dans de belles paroles non plus.

« Je ne dirai pas non à un prochain verre, » conclut Otabek, reprenant une attitude plus familière - celle un peu trop stoïque, qui n'attire pas forcément la sympathie.  

Une invitation silencieuse à remettre ça. D'une manière différente, cette fois-ci. Sans râler, sans se débattre, non. Mais bon, pas dans l'immédiat. Déjà qu'il digère cette première boisson - qu'il se décide de boire les dernières gorgées -, ainsi que cette rencontre quoi que surprenante.

 

Welcome in America !

● feat. Otabek Altin●

▪▪▪   Elle n'attendait pas vraiment de réponse. Elle avait juste dit à haute voix les mots qui affluaient dans sa tête. Le sourire qu'elle reçut en échange valait bien plus qu'un long discours. C'était simple, sincère, réel, autant que Otabek pouvait l'être. Il n'y avait aucun faux-semblant. Rien qu'une sincérité à l'état brut. Mika ferma les yeux. Oui, elle ne regrettait en rien de lui avoir parlé. Elle referait absolument tout à l'identique si cette journée devait être vécue de nouveau. Que ce soit son parcours incohérent, les piques provocantes qu'elle avait pu lancer, les micro-crises de folie. Elle aurait reproduit chaque détail de chaque instant.

Elle aussi souriait. Cela valait mieux que n'importe quelle formule de politesse. Il n'y en avait pas besoin. Avec Otabek, elle sentait que rien n'avait besoin de formalité. Mila rouvrit alors les yeux. Ils rayonnaient de bonheur. Une joie dont elle ignorait la source. Otabek savait créer le bonheur avec trois fois rien, juste en étant lui-même. Elle trouvait cela admirable. Sincèrement.
Elle avait hâte de croiser à nouveau sa route. Après tout, il l'avait dit lui-même : ils se reverraient. Peut-être dans les jours à venir, peut-être dans quelques mois ou à la prochaine saison. Mais ils se reverraient. Du moins, elle en avait très envie.

Et ce jour-là, elle referait du sbiten, encore meilleur que celui qui ondulait dans la casserole encore tiède. Elle lui raconterait sa vie, des histoires sans intérêts juste pour la parlotte, il l'écouterait à peine, et elle parlerait encore beaucoup. Comme d'habitude. Elle l'énerverait aussi, mais tant qu'il se contenterait de froncer les sourcils, elle continuerait. Elle le promènerait sans doute à droite et à gauche aussi. Et elle se ferait remonter les bretelles ensuite. C'était un bon programme, ça lui plaisait bien. En attendant...

- Bien sûr. Il y aura toujours une tasse chaude qui t'attendra.

Mila se leva pour le raccompagner. Après tout, l'heure était bien avancée. Et elle avait encore mille choses à faire. Défaire ses bagages, trouver et nourrir le chat, rétablir le wifi (très important), aller au centre, prendre du repos et repartir plein pot le lendemain.
Les jours allaient être longs, l’emploi du temps chargé. Mais elle était seule. Pas de coach, pas de russe qu’elle risquait de croiser à chaque coin de rue… Cela voulait dire surtout une chose : qu’elle était libre de faire péter l’entrainement quand elle le voulait ! Bien sûr, elle irait de temps en temps, tout de même, mais personne ne pourrait la forcer si elle voulait faire une virée en ville ou squatter chez quelqu’un ou changer ses plans à la dernière minute ! Elle allait vivre comme une américaine ! Manger, faire du shopping, rencontrer des gens, visiter.

Il faudrait d’ailleurs, à leur prochaine rencontre, qu’elle tente de faire entrer Otabek dans un club gay. Cela pourrait être excessivement drôle à faire. Ou bien le faire manger mexicain, l’emmener au Millenium Park, dans un bar de jazz, pourquoi pas aller voir un match de foot américain ? Elle avait très envie de tester pleins de choses avec ce garçon. Ils n’auraient sans doute pas le temps. Mais elle essaierait quand même. Elle se renseignerait pour savoir où il vivait. Elle lui ferait la surprise de passer chez lui et l’emmènerait quelque part. Il détesterait ça ! Mais c’était également pour ça qu’elle le ferait.

Il y avait tellement de choses agaçantes qu’elle avait envie de faire avec lui.
Dans les escaliers, elle lui faisait de grands signes de la main. Ouais, à lui aussi, elle allait lui mener la vie dure.

Mais pour l’instant, elle allait lui laisser tout le loisir de se reposer.
Ce serait pour une prochaine fois.